Cultiver sans pesticides : espaces verts et environnement

De nombreuses municipalités revoient entièrement la gestion du végétal. Cela nécessite de mieux communiquer auprès du citoyen

De plus en plus de villes se mettent au vert et refusent d’utiliser des pesticides. Techniquement, l’objectif n’est pas toujours facile à atteindre. Non seulement il faut repenser complètement les espaces verts mais aussi éduquer le citoyen qui n’accepte pas toujours les herbes folles entre les pavés.

Il en résulte une nouvelle approche que le grand public doit s’approprier. D’où une nouvelle forme de communication axée sur la nature et l’esthétique du paysage.

Cultiver sans pesticides : Choix des plantes et paillage

Se passer de pesticides revient à gérer et à transformer judicieusement les espaces verts. Le choix des plantes et le paillage paraissent les moyens les plus appropriés.

La plante dite rustique peu sensible aux maladies et aux insectes est privilégiée. Heureusement, il existe aujourd’hui une large gamme de produits qui correspondent à ce critère. Le cariopteris ou encore l’eleagnus ou la potentille arbustive sont connus depuis longtemps. Il existe aussi des plantes vivaces, très récentes, qui fleurissent abondamment les massifs comme la gaillarde oranges and lemons, ou encore des plantes annuelles comme l’impatience de guinée Sunpatiens.

Mais ce n’est pas suffisant. Les équipes techniques des espaces verts butent souvent sur la gestion des herbes dites ou des adventices comme les appellent plus couramment les professionnels. Car les jardiniers professionnels doivent ruser. Le plus souvent, ils profitent des de ces intruses et frappent à la source en les empêchant de germer. La germination et la levée nécessitent de la lumière dans la majorité des cas. C’est la raison pour laquelle le paillage est redevenu à la mode. On paille autour des plants de façon à ce que les mauvaises herbes ne lèvent pas.

Des paillages, il en existe de multiples. Le plastique est sans doute à bannir du fait de son manque d’esthétique et d’un recyclage incertain. Les feuilles des arbres, les écorces de pins ou autres conifères voire le résultat de la tonte, se prêtent bien à cette opération. Mais pour être efficace, il faut compter au moins 30 cm de mulch. Les semis, de moins en moins pratiqués pour les plantes à fleurs, ne sont évidemment pas concernés par cette technique. Dominique Soltner dans son livre intitulé Guide du nouveau jardinage conseille de semer les graines dans un compost très fin et bien contrôlé de façon à ce que les adventices soient bien détruites au cours du compostage par une élévation de la température d’au moins 60 °C.

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Les plantes couvre-sol pour une culture sans pesticides

Une autre technique consiste à choisir des plantes couvre-sol qui vont nuire aux adventices en les empêchant de se développer voire de germer. Le lierre ou encore le cotoneaster rampant, des plantes classiques, sont bien adaptées à ce genre de critère. Dans les nouveaux jardins, on voit fleurir aussi des plantes rustiques comme Phyla, plante remise au goût du jour ou des variétés plus récentes comme la pervenche Vinca Minor Temptation. Le bord des trottoirs devient un nouvel espace d’aménagement de même que les pieds des murs où fleurissent par exemple des sedums ou du lierre.

Des outils à la place des pesticides

Les espaces verts se dotent parfois de nouveaux outils plus ou moins sophistiqués. Le désherbage à la vapeur consiste à brûler la jeune plantule. Mais cette technique a ses limites. Sur des plantes trop développées, la vapeur n’aura guère d’effet. Il en est de même sur les plantes dites vivaces comme le chiendent ou le liseron qui ont suffisamment de ressources grâce à leurs racines qui puisent en profondeur. De plus, la vapeur peut détruire en surface toute la flore et la faune liée à l’activité biologique indispensable dans un sol vivant. Le sarclage à l’aide d’un outil spécialisé comme la bineuse peut s’avérer utile dans des espaces assez grands. Il occasionne les mêmes limites que la vapeur. Certaines adventices comme la plupart des plantes en rosette y sont rebelles. Il existe aussi un stade des plantes à ne pas dépasser.

Une flore spontanée mais contenue

L’ensemble de ces méthodes permet aux espaces verts de limiter la flore non désirable. Malgré cela, certaines plantes font encore de la résistance. Entre les pierres tombales, entre les pavés, toute une panoplie de plantes réussit à se développer. On peut citer : le liseron, diverses graminées comme les ray grass, des composées comme les pissenlits ou encore des alysses, érigérons, lychnis, pensées, valérianes, rose trémières…Raison pour laquelle les pelouses agrémentent de plus en plus les cimetières – c’est plus facile à entretenir – et les services municipaux aménagent quand cela est possible avec divers matériaux les espaces entre les tombes.

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Il est toujours possible d’enlever les indésirables à la main. La tache est fastidieuse et coûteuse pour les espaces verts (1). Certaines municipalités laissent cette flore spontanée proliférer de façon contenue et en profitent pour communiquer et livrer des messages sur la biodiversité, la nature et l’esthétique du paysage. Les grandes villes telles que Rennes, Nantes, Versailles, Strasbourg ont déjà franchi le pas.

Cultiver sans pesticides : Ce que pensent les citoyens

Plante et Cité a effectué en février 2012 une enquête auprès de 420 citoyens intitulée Acceptaflore. Les enquêteurs affirment que la flore spontanée s’apprécie différemment. Elle est davantage rejetée dans les micro habitats c’est-à-dire au pied des arbres que dans les macro habitats que représentent les prairies ou les parcs. Les plantes dites mauvaises herbes sont mieux considérées lorsqu’elles sont vives et en abondance. Enfin, les personnes qui les connaissent acceptent mieux leur présence.

Décryptage des messages de communication

Plante et Cité s’est donc penché sur la façon de communiquer pour ou contre la flore spontanée. L’enquête montre que les entreprises qui vendent des pesticides axent leur message sur le propre, la destruction, la facilité, l’efficacité et le bien-être. Les auteurs, Stéphane Tommaret de l’agence Hokus Pokus et Guenael Lanez (Maison de la consommation et de l’environnement de Rennes) analysent ainsi les messages : « En premier lieu le propre n’est en fait que l’expression de la notion de bien opposée à celle du mal. Il est évident qu’il faut lutter contre le mal, agir pour le bien, et pourquoi pas détruire s’il le faut et tant qu’à faire avec efficacité, sans effort et dans son bon droit. »

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Ceux qui prônent la flore spontanée sont principalement des représentants des collectivités locales et non des entreprises privées puisque la question posée ne présente aucun intérêt économique. Les auteurs soulignent aussi que l’Etat ne participe pas non plus à des opérations de communication sur la flore spontanée comme il le fait pour le tabac ou la prévention routière. Cette réflexion peut paraître surprenante mais elle s’intègre dans la suite logique de leur raisonnement. Parler de la flore spontanée, c’est évoquer la biodiversité et les nécessités qui l’accompagnent à savoir la préservation de l’environnement, sa protection, les impératifs légaux qui en découlent, la qualité de l’eau et la préservation de la biodiversité : « Toutes ces nécessités exprimées n’en regroupent en réalité qu’une seule à savoir veiller à la protection de la santé ». Ils en concluent que communiquer sur la flore spontanée relève de l’intérêt public. Il semble nécessaire aussi de s’extraire d’un message technique sur le désherbage puisque nombre de personnes qui ne pratiquent pas le jardinage n’ont aucune notion de mauvaises herbes. Les notions techniques s’effacent progressivement au profit de l’esthétique du paysage.

(1) Ce n’est pas le cas pour un jardinier. L’éradication des mauvaises herbes par les pesticides dans un jardin revient en moyenne à 77 € contre 7 € pour l’achat d’une binette (source étude Acceptaflore, Analyse des communications pour ou contre la flore spontanée, site Plante et Cité)

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