La taupe est-elle un véritable ennemi pour les potagers et jardins ou un animal utile ? Hormis les monticules de terre, que lui reproche-t-on ?
Quoi de plus agaçant que de voir surgir au beau milieu du gazon un tas de terre alors que l’on s’apprête à passer la tondeuse ? Cette surrection indésirable suffit à qualifier de nuisible son auteur. Haro sur les taupes diront certains. Halte au massacre dirons d’autres, plus touchés par le rôle et l’utilité de ce petit mammifère. Éclaircissons la question.
Un insectivore bien solitaire dans ses galeries
Talpa europaea est un mammifère fouisseur exclusivement insectivore qui ne consomme ni graines, ni racines, mais des larves d’insectes comme les vers blancs, les courtilières, les vers taupins et des annélides comme les lombrics vers de terre. Si la taupe peut très éventuellement déranger certaines racines de légumes, par exemple, elle ne les consomme jamais.
Si les lombrics sont reconnus bénéfiques dans les sols des jardins, les autres animaux cités sont par contre des ravageurs de culture. La taupe limite donc la propagation de ces «parasites». Reste que sa consommation de vers de terre est importante et qu’elle élimine donc du même coup des auxiliaires des jardiniers et agriculteurs, mais à l’inverse elle-même contribue par ses galeries au drainage du terrain.
La taupe vit seule dans un réseau complexe de galeries de trois types:
- galeries profondes et permanentes, à 20 cm ou plus de profondeur, qui structurent le réseau,
- galeries de surface plus ou moins temporaires pour la chasse,
- galeries au ras du sol essentiellement réalisées par des mâles à la recherche d’une femelle.
La taupinière est le trop plein de terre dont la taupe ne saurait quoi faire, en même temps qu’un ingénieux système de ventilation, climatisation du réseau.
A savoir: cet animal solitaire est d’une grande discrétion durant de nombreuses semaines dès lors que son réseau est accompli. De plus, plusieurs taupinières dans un jardin correspondent souvent à un seul individu et non à toute une colonie!
Le journal La Hulotte publie d’excellentes études très instructives sur cet animal.
Dégâts, nuisances ou simple gêne?
La question dépend bien sûr du lieu. Difficile de contester la nuisance quand les taupes se multiplient dans des lieux cultures, un potager ou des massifs.
La nuisance est aussi réelle sur un terrain de golf, dans un jardin public, un espace de jeux pour enfant, un terrain de sport ou tout autre espace où l’herbe est utilisée.
Dans l’espace restreint d’une petite propriété privée, d’un jardin, force est d’admettre à l’inverse qu’un simple coup de râteau suffit à résoudre le problème dans la majorité des cas, même s’il est à renouveler deux jours plus tard. Seul un terrain fortement envahi devrait donc faire l’objet d’une lutte, encore faut-il qu’il s’agisse bien d’une taupe et non de campagnol terrestre.
A savoir: la récolte des monticules est l’occasion de se procurer une terre meuble, bien aérée, donc fort utile pour les rempotages ou opérations fines de jardinage.
Moyens de lutte ou destruction irresponsable ?
À lire tout ce qui est écrit dans divers forums sur le net, la question mérite d’être posée.
Pour quelques malheureuses buttes de terre, on en voit certains sortir de véritables stratégies guerrières et faire valoir leurs exploits combatifs pourtant irresponsables tant pour l’environnement que pour les hommes.
Naphtaline pure, boules antimites, anti-coagulants, gasoil et autres carburants, acide, acétone et divers gaz sont de la panoplie.
Quant à l’usage des détaupeurs pyrotechniques, rappelons que leurs dangers ont fait l’objet d’un rapport publié par la Commission de Sécurité des Consommateurs. Souvent chargés avec des projectiles balistiques de type balles ou plombs, les fusils ou canons à taupes, non sécurisés et d’une puissance de feu disproportionnée eu égard à l’ «ennemi», constituent un véritable danger pour l’utilisateur et les personnes à proximité.
Une lutte efficace contre les taupes relève des professionnels taupiers
Euphorbe, poils de chiens, branches de ronces et fil de fer barbelé ou tessons de bouteille, ultra-sons, bouteille vide… si certains trucs fonctionnent mieux à un endroit qu’à un autre, il peut parfois s’agir simplement de l’agitation qui est la nôtre sur le territoire de l’animal qui finit par aller chez le voisin, plus que de l’efficacité réelle des pratiques.
La soi-disant hémophilie des taupes relève de la légende, par exemple. Du verre peut donc blesser l’animal, mais bien inutilement !
Quant au coup de bêche sur l’animal au moment ou il sort la terre du sol… seul les plus patients et les plus doués y parviennent ! On peut estimer qu’il est beaucoup plus rapide de passer le râteau sur la taupinière !
Mais, si le problème des taupinières est avéré dans une production agricole, horticole ou maraîchère, ou si leur présence est problématique pour l’usage de l’espace (terrain de sport ou de jeu par exemple), la solution la plus efficace reste encore l’appel à un professionnel taupier.
Si l’approche évoquée dans cet article semble des plus protectionnistes vis-à-vis de la taupe, il ne s’agit nullement de faire état d’une quelconque sensiblerie devant la mise à mort d’un animal. La taupe n’est pas un animal rare d’une part, et il se tue chaque jour une multitude d’animaux de par le monde pour des raisons diverses; Mais chasser les taupes d’un terrain est souvent très aléatoire et les moyens (tant financiers que techniques) mis en œuvre sont souvent en totale disproportion par rapport à la gêne réellement occasionnée.